coelie

Rue des Coquelicots.

Jeudi 26 mars 2009 à 18:38

Cher toi,

C'est vrai, je l'avoue, tu me fais un peu peur, quelquefois le soir je me dis que tu es peut-être aussi perdue que moi et j'en suis toute chamboulée, ça découpe mon ventre aux ciseaux crantés. Il y a autour de toi comme une aura nébuleuse qui m'empêche de te connaître. Et ça m'inquiète, parce que je tiens à toi, tu sais, j'ai envie d'être toi un jour. Tu es mon seul modèle et mon seul vrai repère, il n'y a personne d'autre au monde que je n'aie envie de devenir. Je t'en fais la promesse, personne d'autre.

A chaque instant je m'approche un peu plus de toi, je devine les bords de ta silhouette. Plus le temps défile et plus j'apprends à nous déposséder de nos traits de fillette pour revêtir les tiens. Je les aime, tes traits, nos traits, je les chéris mieux que personne ne pourra jamais les chérir, il me semble. Mais tu me cries de prendre la fuite, parfois. Au fond, j'aime que tu ne sois qu'imaginaire, car  alors c'est à moi de t'inventer, de t'écrire, de te rêver. Et j’y mets toute ma fougue, tous mes espoirs, je veux faire cela avec application, pour que tu sois quelqu’un de bien, quelqu’un de respectable. Et plus tu te réalises en moi, plus je deviens toi, et plus j'ai peur de ces chemins que nous empruntons à la hâte. Des noircissures qu'on ne peut plus jamais gommer, ensuite.
Je suis la seule sur qui tu puisses vraiment compter, pour toujours, toi et moi jusqu'à la fin et jusqu'au bout de la terre sans aucun autre possible. C'est un peu dur à porter, tu sais, je me sens responsable de toi, j'ai l'impression que tout ce que je fais, ou ne fais pas, pourrait te nuire, et ça m'étouffe, ça m'étouffe. Et alors je veux un peu de distance, je veux te chasser le plus loin possible parce que tu m'en demandes trop. Parce que je te porte à bout de bras. Et pour me venger, je te demande, je t'ordonne, d'avoir une vie splendide. Splendide, tu entends.
N'oublie pas que je place tous mes espoirs en toi, que j'ai en toi une confiance inouïe.

Je voudrais juste être bien certaine que tu es fière de moi. Et alors, je te le promets, je n'aurai plus peur de nous.
 

Vendredi 20 mars 2009 à 20:22

C'était il y a un an, vous vous souvenez, les points d'exclamation, les nuages et ma boucle d'oreille perdue. Ce lui qui me disait toi.

C'était il y a un an, maintenant j'habite au quatrième étage, dans ma tour de nulle part, j'habite au quatrième et je ne vois pas le sol. Ni le sol, ni  le cheval, ni le monsieur charmant pour braver les ronces. Et j'ai les cheveux courts, les cheveux qui ne touchent pas le sol, qui ne touchent pas même mes épaules.

Mardi 17 mars 2009 à 21:07

Ces chuchotements laissés au hasard, ces encouragements pour me hisser au-delà des façades, ces clins d'oeil épistolaires, ces petites douceurs à propos de rien, à propos de mes phrases d'un instant, ces portes ouvertes toujours à sourire déployé.
Au gré de ces articles je me suis constitué un habitat virtuel, une petite cabane en coquelicots et en photos de Doisneau, qui ne prétend à rien mais qui a gagné beaucoup.
Chaque petit message posté ici ouvre un peu plus grand les parenthèses, et les plus petites attentions sont des pulsations d'aile.

Merci, de me soulever un peu du sol quand j'oublie que la brise est légère, de me donner la main d'aussi loin pour ériger entre nous des ponts en pâte à sel.

Merci, de me raccrocher comme ça un peu au monde, de ne pas nous laisser ainsi, mes pages et moi, dépérir dans le silence et l'oubli.

Dimanche 15 mars 2009 à 15:27

Tu crois qu’un jour on arrêtera de jouer à ce qu’on sera plus tard et qu’on saura enfin ce qu'on veut ?

Khâgne or not khâgne, that is the substantial question.

Mercredi 11 mars 2009 à 19:38

Cher toi,

Tu vois, je fais tout ce que je peux, je me bats bec et ongles, j’y mets chacune de mes inspirations. Tu ne sais que trop comme c’est harassant, de consacrer toutes les parcelles de soi à nos fondations, de se dire qu’on se fabrique des demains solides et rassurants. S’il te plaît, promets-moi de ne pas oublier toute cette énergie qui était la tienne, toute cette armure qui te faisait transpirer, toutes ces choses à côté desquelles tu es passée, ces parenthèses que tu n’as jamais ouvertes.
N’oublie jamais ce que tu étais à dix-huit ans, n'oublie pas que tu dois beaucoup, beaucoup, à cette jeune fille si sérieuse. Si je le pouvais, je te ferais jurer, jurer que tu te souviendras toujours des dons que je te fais. Je t'offre tout, presque tout, pour que tu aies maintenant la vie que tu as. J’espère que tu te rappelles tout cela.
Oh, et moi, j'ignore tout de toi, mis à part tes yeux verts, j'ignore ce que tu fais, ce que tu es, où tu es, donne-moi des indices, souffle-moi à travers le temps ce que tu es devenue. Que j'aie une idée de l'endroit où regarder, de la façon de m’y prendre, de ce que je dois faire. Tu es vilaine de sourire ainsi, à présent, de te revoir si triste, si inquiète. Ca t’amuse bien, méchante. Que tu saches tout de moi et que je ne sache rien, ni si tu es encore une demoiselle ou déjà une dame, s’il y a un jardin là où tu vis, si tu as les cheveux courts ou les cheveux longs.
La surprise ne sera pas moins belle si tu me donnes une piste, rien qu’une seule. Je ne serai pas moins satisfaite d’être devenue toi.

Tu sais, je suis sûre que tu ne me décevras pas, que tu me réserves plein de beaux détours.
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